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Stéphane Pilon : voyager en ski de fond

Un « marathon » canadien de ski de fond

Cent soixante kilomètres parcourus en ski de fond entre Mont-Tremblant et Lachute en totale autonomie et nuit à la belle étoile, ça vous dit? C’est le programme du Marathon Canadien de Ski (MCS), que tentera de compléter pour une 18ème fois comme Coureur des Bois Or Stéphane Pilon, conseiller et entraîneur de course à pied chez Boutique Courir Longueuil. S’il s’agit de sa dix-huitième année en autonomie totale, il n’en demeure pas moins que c’est sa vingt-septième année de participation à ce célèbre défi hivernal, distinction qui lui vaut aujourd’hui son nom dans le livre d’or du MCS, en plus d’un numéro de dossard permanent!

Un événement amical et très prisé des skieurs

Mais sinon, qu’est-ce que le Marathon Canadien de Ski? C’est ni plus ni moins que le plus grand événement de ski classique en Amérique du Nord, qui sera en 2020 à sa 54ème édition. Une « fête en l’honneur de l’hiver canadien », sur la plus longue et la plus ancienne piste de ski de fond des environs, ouverte à ce seul et unique moment de l’année. Cent soixante kilomètres d’itinéraire à parcourir dans des conditions de neige idylliques, que le skieur peut choisir de faire en partie, en autonomie partielle ou totale.
Sans compétition, temps ou chronomètre, ce qui vous attend au bout du chemin n’est rien de moins que la satisfaction de l’effort et une tête remplie d’images et de souvenirs.

 

photo : Stéphane Pilon

Boutique Courir (BC) Mise à part une vingt-septième participation à cette course mythique, que vas-tu chercher dans ce parcours, qui n’a plus aucun secret pour toi?

Stéphane Pilon (SP)D’abord et avant tout, il y a ma passion pour cette discipline, qui est selon moi la plus complète. En y ajoutant la préparation mentale et physique, le plaisir de vivre une introspection sur soi-même, la joie de revoir des gens qui, tout comme moi, reviennent année après année, le défi de compléter l’épreuve avec les conditions de neige et météo que Mère Nature nous envoie pour ces deux jours, avoir sur les épaules ce sac à dos de quelques kilos pendant 165km et avancer avec celui-ci sur le plat, les montées, les descentes, sont des éléments que j’aime vivre et revivre encore. Soyons honnêtes… Même si le temps et la position ne sont pas enregistrés au final, il faut néamoins rencontrer la barrière du 15h30 à la 5e étape de chacune des deux journées pour espérer faire le MCS en entier.

 

BC Qu’est-ce que tu portes dans ton sac, sur ces deux jours de ski?

SP – Mes deux ou trois premières années de participation en tant que Coureur des Bois Or ont été formatrices pour ajuster le contenu de mon sac. Aujourd’hui, j’apporte pas mal toujours le même stock : mon sac de couchage, bivouac, mouflon, surmouflon, doudoune, vêtements de rechange pour le jour 2, nourriture (lyophylisée principalement) et liquides pour repas du soir et du déjeuner, quelques suppléments énergétiques pour les  »entre deux points de contrôle », bouteille de liquide énergétique pour étancher la soif tout au long du parcours, quelques farts… En 2019, j’ai utilisé mes skis à peaux, alors je n’ai pas eu besoin de transporter de farts.

 

BC Depuis le temps que tu fais le MCS, est-ce que tu te fais encore surprendre par des conditions météorologiques ou des situations imprévisibles, qui mettent à mal ton organisation?

SP – Vers la fin de la semaine, je prends connaissance de la météo annoncée. S’il y a un besoin plus particulier qui est requis, j’ajuste. Les surprises, sans en être vraiment, sont les conditions changeantes de la neige des pistes. Sur 165km, il est normal qu’elles changent : le vent, la température, l’ensoleillement vont avoir un effet direct sur la neige.

 

BC Est-ce que tu fais d’autres défis comme celui du MCS dans une année? Mis à part tes entraînements en vue de l’événement, est-ce qu’il t’arrive de faire des séjours de ski de fond et camping d’hiver pour le plaisir? 

SP – Outre le MCS comme défi hivernal, j’ai complété quelques triathlons longues distances dans le cadre d’événements Ironman en guise de défi d’endurance. Pour le plaisir, j’ai fait quelques expéditions de ski de randonnée en refuge à l’occasion de séjours variés, allant d’une fin de semaine à quelques jours (parc de Mont-Tremblant, parc des Monts Valin, La traversée de Charlevoix, Parc de la Gaspésie).

 

photo : Stéphane Pilon

BCVoyages-tu seul, la plupart du temps? Qu’il s’agisse du MCS ou de tes sorties solo, que ces expéditions t’apportent-elles, du point de vue humain, selon toi?

SP – Pour ce qui est du MCS, il y a mon cousin qui m’accompagne toujours, en voiture. Il est un expert en carte et boussole et trouve toujours son compte à voyager en parallèle de mon parcours, en prenant des petites routes qui croisent le trajet, des endroits où personne sauf les skieurs se retrouvent. Quant aux sorties de ski en refuge, je les fais avec des amis. Par conséquent, les liens d’amitié se tissent. Nous avons de belles discussions et évoluons dans une franche camaraderie.

 

BC Dirais-tu que tu es plus un skieur de fond ou un campeur d’hiver? 

SP – Je suis un skieur de fond d’abord et avant tout. Je n’avais jamais fait de camping d’hiver avant de vivre ma première expérience lors du MCS de 1996.

 

BC Que recherches-tu dans le sport, personnellement et mentalement?

SP – Le sport est un mode de vie pour moi. Il apporte de bienfaits physiques indéniables, mais aussi psychologiques. Partant de cela, j’aime pratiquer le sport en me mettant des défis de bon niveau. Cela me permet de connaître mes capacités, tant physiques que psychologiques, et de les pousser à leur limite… voir et vivre jusqu’où je peux ou pourrais et ne pourrais aller. C’est un sentiment de bien-être total que je ressens et qui me plaît énormément.

BC La technicité du ski de fond est un art en soi. Est-ce que les aspects du fartage, de la glisse, des points techniques du ski dans sa composition (matériau) sont des sujets qui te tiennent à coeur?

SP – Après plus de 40 ans de pratique, je maîtrise très bien la technicité du ski de fond. Par le passé, j’ai suivi des cours ici et là pour améliorer ma technique, en plus de compléter le niveau 1 de la formation de moniteur de ski. Quand je conseille un client dans le rayon de ski de fond, je n’hésite pas à partager mes connaissances sur le fartage, la glisse, les points techniques, etc.

 

BC À quoi penses-tu, sur une piste de ski? 

SP – À tout, bien honnêtement! Mon cerveau peut aller et venir ans toutes les directions de pensée. Si je suis préoccupé par quelque chose de spécifique, mes pensées convergeront vers cette chose. Si tout est au beau fixe – pour la plupart du temps heureusement – alors c’est là que les pensées s’entremêlent et voguent au gré du paysage…

 

On dit que le temps forge l’expérience… Stéphane l’a appris à ses dépends lorsqu’il s’est lancé pour la première fois en autonomie complète sur le parcours du MCS, en hiver 1996. Ayant pu grapiller ce qu’il pouvait d’équipement auprès de ses connaissances, il a bien fait rire de lui au moment de déballer son sac à dos! Sans doudoune et uniquement pourvu d’un sac de couchage 3 saisons pour se réchauffer, il n’allait pas bien loin cette nuit-là! Heureusement, ses compagnons de voyage ont pu lui prêter de quoi passer une nuit décente. La météo favorable (-5°C au minimum cette nuit-là) n’aura pas eu raison de lui. Il ne se fera plus jamais prendre au jeu!