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La récupération : comment bien récupérer?

De nos jours, la littérature en science de l’activité physique s’accorde de façon assez unanime pour dire que la récupération est un atout, un must dont on ne saurait se priver et ce, sur les différentes temporalités que composent notre programme d’entraînement.

Mais qu’est-ce que « bien récupérer » signifie au juste ? En physiologie du sport, la récupération « correspond au temps nécessaire, après une performance, pour que l’organisme retrouve un état compatible avec la reproduction d’une performance égale »1. En musculation par exemple, la récupération est l’occasion pour les cellules de s’adapter physiologiquement et musculairement suite à un entraînement en surcharge ; elle permet au corps non seulement de se remettre de l’effort passé, mais aussi de s’améliorer.

 

Comment bien récupérer ?

Pour bien récupérer après un effort, la voie la plus simple et la moins coûteuse serait sans doute de vous allonger et de fermer les yeux, dormir le temps qu’il faut pour recharger les batteries. Mais l’humain est compétiteur… il cherche des voies plus rapides, des moyens de contournement. De connivence avec notre société productiviste, la science déploie de nombreux efforts pour sans cesse trouver des accélérateurs de la récupération.

Résultat : des méthodes, des produits, des protocoles de récupération après l’effort. Quelques pratiques sont plus efficaces que d’autres et voient leur cote augmenter, telles que les « bains contrastes, les massages sportifs »2, ou encore des produits alimentaires, comme le très connu lait au chocolat post-entraînement.

Attention tout de même : ces méthodes de récupération révélées par des études peuvent être positives et efficaces chez quelques un·es, mais s’avèrent inopérantes, voire nuisibles chez d’autres. Avant de commencer une habitude, renseignez-vous d’abord. Passez en revue tous les détails de l’étude : quel contexte, quels sujets, combien de temps, quelle dose utilisée du produit, etc. Des résultats significatifs apparaissent-ils et sont-ils dépendants des facteurs précédents? Ces méthodes sont-elles reproductibles dans la vie de tous les jours?

Avant d’ingérer ou de faire subir un traitement inhabituel à votre corps, renseignez-vous. Cela vous évite les mauvaises surprises ou des dépenses inutiles.

 

Les cycles

En entraînement, on compte très souvent par cycles. L’un des cycles les plus connus est le cycle olympique : quatre ans, au cours desquels les athlètes peaufinent leur geste, perfectionnent leur technique, accumulent des charges d’intensité considérables afin d’atteindre leur pic de performance ultime.

À l’intérieur de ces quatre années, le cycle olympique est lui-même constellé de cycles plus petits : les macrocycles (se comptent en mois, un championnat national par exemple), les mésocycles (en semaines, telle ou telle compétition importante durant la saison), les microcycles (en jours, des séances d’entraînement plus ou moins intenses), etc. Chacun de ces cycles comprend son propre type de récupération, parfois active, parfois passive. Mais une chose est sûre, c’est que la récupération est présente et constituante à part entière du plan d’entraînement.

Outre la récupération pour les cycles plus petits – que nous n’aborderons pas dans cet article – on ne saurait que trop insister sur l’importance des périodes de repos plus longues, comme le repos de fin de macrocycle suivant l’atteinte d’un objectif important, ou encore le repos annuel. Ce dernier suit normalement la fin d’une saison et se compose d’une à quatre semaines. C’est sur ce type de récupération que nous nous pencherons aujourd’hui.

 

Planifiez votre période de récupération

Pour les sportifs·ves qui ne tiennent pas en place, cette période de repos « obligatoire »3 est parfois vécue difficilement. Mais ne vous méprenez pas ! Selon votre situation, plusieurs possibilités s’offrent à vous pour investir ce laps de temps efficacement.

 

Dormez

Au début, c’est le premier bienfait duquel on bénéficie. Soudainement, on n’est plus obligé·e de s’entraîner très tôt le matin ou le soir. On peut s’autoriser à reprendre le sommeil qu’on a négligé dans les dernières semaines. Et on a tout intérêt à en profiter, puisque c’est quand on dort que se consolident les adaptations musculaires cultivées à l’exercice.

Une période de sommeil normale oscille entre 7,5 et 9 heures, mais « des études ont démontré que les athlètes dormant des nuits prolongées (9-10 heures) ont une meilleure performance que ceux qui ne dorment que 8 heures par nuit »4. Des chiffres à ne pas prendre à la légère lorsqu’on a une pratique sportive régulière et des objectifs qui nous tiennent à cœur.

 

Faites la tournée des professionnel·les de la santé

À moins d’avoir déjà eu affaire à elleux pendant l’année, la période « hors-saison » est idéale pour aller passer une tête chez votre médecin, dentiste, dermatologue, ophtalmologue, gastroentérologue, podologue, acupuncteur·rice, chiropraticien·ne, physiothérapeute, ostéopathe, massothérapeute, nutritionniste, psychologue préféré·e! Puisque certaines inflammations peuvent prendre source à des endroits insoupçonnés, peut-être réglerez-vous certains problèmes avant même qu’ils n’apparaissent.

Une fois au cabinet médical, ne soyez pas avare de détails… Parlez de votre pratique ouvertement et mentionnez tous les petits bobos, moments de fatigue, déséquilibres hormonaux ayant pu apparaître durant l’année. De cette façon, votre médecin de famille de vous relayera aux bon·nes professionnel·les de la santé si une dysfonction venait à pointer le bout du nez. Et monétairement, « il revient souvent moins cher de consulter préventivement que d’attendre d’être blessé·e et de devoir être traité·e régulièrement sur une longue période »5.

Renforcez vos muscles

Plus les objectifs sont rapprochés dans la saison, plus la charge d’entraînement augmente. Par conséquent, on néglige les séances de musculation visant à entretenir la posture, les muscles profonds et stabilisateurs, la gaine abdominale et dorsale. Si vous craignez de vous tourner les pouces pendant l’hiver, remplacez vos séances d’entraînement normales par des séances de renforcement musculaire. C’est le moment d’agir en prévention : « faites des exercices pour redonner une bonne mobilité à votre colonne vertébrale »6, l’autoroute par laquelle transigent toutes les informations du cerveau au reste du corps.

 

Faites une mise à jour de votre alimentation

En hiver, les surplus accumulés pendant le temps des fêtes aideront peut-être à vous faire aller en ce sens (!), mais prenez tout de même le temps de faire une petite analyse qualitative de votre alimentation. Si vous pensez faire partie de ceux ou celles qui, nutritionnellement parlant, « dévient » du schéma alimentaire traditionnel tout en pratiquant un sport assidument (végétarien·ne·s et toutes leurs variantes, « paléos », « crudivores », sans gluten, sans lactose, etc.), vous avez tout intérêt à effectuer un bilan sanguin au moins une fois par année. Si des anomalies surgissent, peut-être serez-vous tenté·e de vous rapprocher d’un·e nutritionniste, afin de faire le portrait robot de votre assiette et d’y déceler les aliments qui auraient avantage à être ajoutés, remplacés ou couplés à d’autres, afin d’améliorer leur potentiel d’assimilation dans le corps.

Retrouvez l’équilibre mental

Qu’il s’agisse de séances de yoga, de renforcement musculaire, de mobilité, d’étirements, retrouver un équilibre « physique » est primordial pour bien récupérer et repartir une nouvelle année du bon pied. On aurait tort de négliger la tête, cette tour de contrôle qui transige constamment, sans cesse tournée vers les objectifs à atteindre et les obstacles à surmonter, à l’entraînement comme dans la vie du quotidien. Avez-vous entendu parler de la méditation, du qi gong, le tai-chi-chuan, le yoga détente ou la sophrologie? Depuis combien de temps, par exemple, ne vous êtes-vous pas assis·e pour lire un bon livre?

En plus de vous faire oublier les tracas du quotidien, faire une activité différente – jouer aux échecs, faire des mots croisés, du tricot, écouter de la musique, regarder des images, prendre une marche dans le bois, apprendre à jouer d’un instrument de musique – aide le cerveau à faire table rase des pensées résiduelles nuisibles et met la table pour une nouvelle année avec des idées claires, posées et sensées.

 

Variez les activités

Dans la même veine que les activités relaxantes, vous gagnerez à remplacer temporairement vos sports de prédilection en découvrant de nouvelles pratiques. En effet, le simple fait de changer une habitude permet au cerveau de se concentrer sur une tâche inédite. Au niveau cérébral, les neurones responsables du système cardiovasculaire prennent congé et cèdent leur place à des cellules nerveuses choisies en fonction de la nouvelle mission à accomplir.

Par exemple, changer des sports cycliques et répétitifs (course à pied, vélo, natation) pour des sports de raquette (squash, badminton, tennis, etc.), des sports collectifs (soccer, basketball, baseball, frisbee, ringuette, etc.) ou encore des sports requérant une bonne dose d’équilibre (escalade, surf, paddle board, gymnastique, kayak, canot, etc.) génèrent des adaptations cellulaires bénéfiques pour le cerveau.

En plus de faire le vide mentalement, vous améliorerez votre motricité fine, votre dextérité, votre explosivité, voire exacerbez vos sens comme l’ouïe, la vue, l’odorat, etc.

 

Attention au surentraînement

Bien sûr, qui dit « période de repos » dit baisse de l’intensité et du volume d’entraînement. Les activités énumérées ci-dessus ne seront profitables qu’à condition d’être pratiquées à une intensité moindre, voire quasi nulle, dénudées d’une quelconque structure ou planification. Le seul leitmotiv qui vaille durant la saison off reste celui du « je ne fais que si j’ai envie ». En gros, si pas envie, on reste couché·e!

Cette injonction s’applique tout particulièrement aux personnes qui présentent un grand sentiment de fatigue, des symptômes de surentraînement comme l’insomnie, une variation soudaine du poids, un déséquilibre hormonal, etc. La meilleure façon d’évaluer la posologie du repos reste d’aller d’abord voir sa·son médecin du sport, la·lequel saura certainement vous orienter sur une période plus ou moins longue de repos complet.

 

Comme on l’a vu dans ce texte, chaque activité ou événement vécu en parallèle de l’entraînement est un élément de plus qui compose notre emploi du temps. Les reconnaître comme des parts constitutives de ce que nous sommes est un pas de plus vers une meilleure compréhension de l’importance de la récupération annuelle, spécialement dans un contexte où l’on est actif·ve professionnellement et physiquement.

Dans cet intervalle de temps, faire un bilan de l’année passée permet de se rendre compte des charges qui nous incombent et d’aborder la nouvelle année de manière plus réaliste. Ceux et celles qui « joueront le jeu » et se livreront sans tricher à ce moment indispensable seront les vraies gagnant·es en bout de ligne. À vos marques, prêt·es, relaxez!

 

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Par : Ariane Patenaude, B.Sc Kinésiologie

 


Sources :

1 Legros Patrick. Récupération et entraînement. In: Les Cahiers de l’INSEP, n°14-15, 1996. La récupération en sport : approches des techniques et des moyens. pp. 119-122. DOI : https://doi.org/10.3406/insep.1996.1175 [consulté le 08-08-2024]
2 Thibault, Guy. « Entraînement cardio – Sports d’endurance et performance », Vélo Québec Éditions, 2009, p. 206.
Ici, les guillemets sont importants. Les périodes de repos varient d’un individu à l’autre et peut être conditionné à d’autres facteurs, tels que le calendrier de compétitions passé et à venir.
4 Harvey, Jean-François. Courir Mieux. Éditions de L’Homme, 2013, page 139.
5 Ibid, page 143.
6 Ibid, page 136.