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On sort le vélo! Quelques trucs pour que ça roule tout l’été…

La saison de vélo commence à peine au Québec. Avec la fonte des neiges et ses premières courses de vélo printanières, nombreux et nombreuses sont ceux et celles qui trépignent à l’idée d’arpenter les routes et de manger des kilomètres, pour découvrir de nouveaux lieux, partir en randonnée d’un jour, faire du cyclotourisme, une balade ou de la compétition. Toutefois, si vous souhaitez vivre pleinement votre saison de vélo, la prudence est de mise! Petit survol de la littérature en la matière…

Au niveau de la sécurité à vélo, bien que l’avènement du casque de protection ait considérablement diminué la gravité des blessures à la tête¹, les chutes provoquent souvent des traumatismes aux épaules et aux extrémités du haut du corps, ces membres étant le plus souvent les premiers à toucher le sol lors d’une perte de contrôle². Dans la catégorie des blessures d’usure, les syndromes patello-fémoral et de la bandelette ilio-tibiale restent les blessures les plus communes à vélo, en plus des possibles lésions musculaires au dos et au bas du corps³.

Souvent dues à une mauvaise posture, certains facteurs morphologiques et biomécaniques, les blessures d’usure s’installent de façon insidieuse au fil du temps. Au début, on les balaye du revers de la main en se disant que ce sont là des douleurs « douces, familières, non limitatives [et] inhérentes au sport »⁴ .Qui n’a pas déjà frotté son bas du dos ou son genou endolori après une longue sortie de vélo en se disant, non sans une certaine fierté : « une bonne journée au boulot »?!

En sports, spécialement en cyclisme et en triathlon, on confond souvent le mot « douleur » avec l’idée que l’entraînement a été efficace ou a porté ses fruits, alors que ces signes devraient plutôt nous alerter sur un changement de notre comportement ou de notre équipement en entraînement. Peu à peu, cet inconfort modifie notre posture, crée des compensations et entraîne des douleurs chroniques, pour finir par l’arrêt complet de l’activité.

D’accord, mais peut-on prendre le problème à bras-le-corps avant qu’il ne survienne? Bien sûr! Pour prévenir plutôt que guérir, nous avons récolté pour vous quelques réflexes à adopter avant, pendant et après votre saison cycliste.

Les facteurs internes

Nous sommes tous différents. Nous naissons avec un certain bagage génétique et anatomique qui nous prédispose (ou pas) à des facilités dans des sports ou des activités données. Cependant, à force de travail sur certaines qualités musculaires, techniques ou habitudes de vie, d’aucuns peuvent prétendre à pratiquer l’activité qu’ils ou elles ont choisie. Avec de la patience et de la persévérance, tout vient à point à qui sait… pédaler!

Voici quelques uns des aspects propres à chaque individu qui doivent être pris en compte dans une préparation physique et qui peuvent être modifiés avec le temps. 

 

  • Composition corporelle : Poids du corps, masse adipeuse, masse musculaire, etc. Une évaluation anthropométrique est un bon point de départ pour ceux et celles qui souhaitent commencer à être actifs(ves). Idem du côté de la santé (historique d’une blessure antérieure, instabilité ligamentaire, etc.). Faire le point sur soi-même est un premier pas. Vous saurez où vous en êtes et prendrez les précautions qu’il faut pour bien progresser dans votre entraînement.
  • Équilibre musculo-squelettique : Souvent mis en cause dans les blessures d’usure, comme le syndrome patello-fémoral ou de la bandelette ilio-tibiale. Si l’on débute une saison avec une hanche plus forte que l’autre sans en faire vraiment grand cas, on progresse et on pousse le déséquilibre aux extrêmes… Avec le temps, le côté le plus fort le devient encore plus, tandis que le côté le plus faible suit la cadence comme il le peut… jusqu’à ce qu’il flanche. La hanche forte prend alors le dessus et compense pour la hanche la plus chétive, jusqu’à se que l’immeuble entier s’écroule.
  • Niveau technique du ou de la cycliste : Plus spécifique au vélo, la stabilité posturale, l’aisance sur la route et en peloton, l’habileté à se mouvoir sur le vélo en pleine vitesse (ex: prendre une bouteille, toucher son partenaire, « frotter », etc.), les virages, les descentes… Ces petits trucs peuvent vous faciliter la vie et parfois vous sortir de situations rocambolesques. Plusieurs clubs de vélo inculquent aux jeunes et aux novices à maîtriser les habiletés de bases sur la selle et une première séance gratuite. En vérifiant sur la liste des clubs de vélo affiliés à la Fédération Québécoise des Sports Cyclistes (FQSC), peut-être en trouverez-vous un près de chez vous. N’hésitez pas à vous informer.

 

Les actions à entreprendre

  • Le (sacro-saint) principe de progression : N’allez pas trop fort, trop vite! En début de saison, évitez de partir « en fou » avec beaucoup de kilomètres et des intervalles dès les premières sorties de vélo. Même si vous avez préservé votre niveau cardiovasculaire en troquant vos souliers à clips pour des skis durant la saison morte, vous devez retourner en selle graduellement pour retrouver le mouvement spécifique du pédalage. Certes, le vélo, « ça ne s’oublie pas », mais l’intensité dans son mouvement spécifique doit être constamment entretenue, sous peine de repartir d’un peu plus loin au printemps.
  • Commencer sa saison tôt : Support d’entraînement, cours de groupe, conditionnement musculaire, etc. Le fait de rester en selle d
    Un vélo au braquet très élevé (source : Troquet du Cycliste).

    urant l’hiver maintient la biomécanique spécifique au vélo en état d’éveil. La transition vers la route n’en sera que plus facile et les réflexes de la route reviendront plus facilement.

  • Réglez vos déséquilibres musculo-squelettiques : Pour régler le bobo avant qu’il n’apparaisse, l’idéal est de travailler sur votre équilibre musculaire tout au long de l’année, lors de séances supervisées ou seul(e) visant le renforcement de vos muscles stabilisateurs des hanches, des genoux, des chevilles et du tronc en première ligne.
  • Bien « mouliner » : Pédaler avec une cadence élevée, une grande vélocité. Malheureusement, on observe souvent un braquet de vitesses non adapté au/à la cycliste. Le « braquet » (ou développement) signifie le ratio entre la taille du plateau avant et du pignon arrière du vélo. Trop élevé (un gros plateau et un tout petit pignon arrière, comme sur la photo), il induit une cadence très lente, qui amène beaucoup de tension dans les cuisses et entrave les accélérations, réduit la réactivité et la fluidité du geste. Sur piste et en compétition sur route, trouver le braquet qui corresponde à votre profil et au type de course à laquelle vous prenez part est un art en soi que seule l’expérience permet de peaufiner. Sur la route, testez votre corps en faisant l’exercice suivant : partez avec un braquet élevé (ex: gros plateau et petit pignon). À vitesse égale, passez d’un intervalle à l’autre en diminuant à chaque fois d’un braquet (de plus en plus facile), alterné avec quelques minutes de repos à braquet libre. Vous acquerrez ainsi plus de souplesse et de facilité à appliquer le ratio optimal selon la vitesse et le relief qui se trouve devant vous.

 

Un tableau des braquets. La colonne horizontale représente le nombre de dents sur le plateau avant et la colonne verticale, le nombre de dents sur le pignon arrière du vélo. Pour bénéficier d’un développement intéressant, vous aurez avantage à avoir un spectre assez élevé de vitesses sur votre pignon arrière, combiné aux deux plateaux avant. De nos jours, de nombreuses variations existent, répondant au profil de cycliste de chacun(e).

Les facteurs externes

Si vous atteignez le stade d’humain bionique et que tous les éléments mentionnés ci-dessus ne vous concernent pas, vous n’êtes cependant pas immunisé(e)s face aux éléments extérieurs. Soyez attentifs(ves) aux éventualités et prenez les précautions qui s’imposent. 

 

 

 

 

  • L’environnement : Météo, conditions des routes, des pistes, etc.
  • Le positionnement du vélo : Sortie de selle, avancement et recul de la selle, position des cales sous les chaussures, longueur des leviers du pédalier, longueur des cocottes (pignons), longueur de la potence, largeur du guidon, hauteur du guidon, ratio de vitesses trop élevé par rapport à la force du cycliste, etc. Si certaines mesures restent les mêmes, d’autres peuvent avoir évolué avec le temps, d’où l’importance d’être parfaitement au point sur votre bolide pour amorcer la saison avec la conscience tranquille.
  • Équipement personnel : Quelques exemples…
    • Chaussures : trop larges (le pied se raidit en dorsiflexion lors de la remontée du pied, par peur de perdre la chaussure), trop étroites (la voûte plantaire est compressée et les récepteurs cutanés n’envoient pas l’information au cerveau s’il y a apparition d’une douleur), le sang ne circule plus si on serre trop, etc.
    • Chamois : un chamois trop mince / trop épais ou qui irrite au niveau des coutures crée un inconfort qui modifie la posture et l’alignement de la colonne vertébrale.
    • Largeur de la selle, appui non adéquat : Trop large, elle entrave le mouvement des cuisses dans le mouvement de révolution, crée une posture de compensation qui n’est pas optimale. Trop étroite, les os pelvien et du sacrum ne sont pas soutenus adéquatement, font travailler des muscles profonds inutilement. Dans tous les cas, vous perdez de l’énergie et revenez à la maison avec l’entre-jambes endolori. Heureusement, un grand choix de selles existe aujourd’hui, de toutes les longueurs et de toutes les largeurs. Certaines présentent des appuis sur-mesure pour le pelvis capricieux de madame ou des ouvertures conséquentes pour laisser le « paquet » de monsieur en toute liberté. Renseignez-vous chez votre détaillant de vélo pour connaître les différents modèles.

 

Les actions à entreprendre

 

  • Roulez! Certaines situations ne font surface qu’après avoir engrangé une certaine quantité de kilomètres. Ne boudez pas votre plaisir et partez à l’aventure! Rien ne vaut l’expérience, qui parle souvent d’elle-même et qui vous fait adopter naturellement les mesures qui s’imposent à vous comme nécessaires.
  • Pèlerinage annuel chez votre mécano : Tous les ans, une visite chez votre mécanicien(ne) de vélo s’impose pour un positionnement et une révision mécanique de votre engin.
  • Sortez groupé(e)s : Si vous craignez les chutes, n’hésitez pas à trouver un groupe avec qui rouler. Vous y apprendrez les rudiments du vélo en peloton, les codes à respecter, les gestes à adopter. Par-dessus tout, vous vous familiariserez avec la situation du cycliste, quelque part entre la voiture et le piéton, les responsabilités qui viennent avec votre statut et la vigilance à toute épreuve que celui-ci implique.

 

 

Références


  1. Cook A, Sheikh A. Trends in serious head injuries among English cyclist and pedestrians. In J Prev 2003; 9: 266–267
  2. C. Barrios, N. D. Bernardo, P. Vera, C. Laíz, M. Hadala. Changes in Sports Injuries Incidence over Time in World-class Road Cyclists. Published online: November 6, 2014 Int J Sports Med 2015; 36: 241–248
  3. Clarsen B, Krosshaug T, Bahr R. Overuse Injuries in Professional Road cyclists. Am J Sports Med 2010; 38: 2494–2501
  4. [Traduction libre] C. Barrios, N. D. Bernardo, P. Vera, C. Laíz, M. Hadala. Changes in Sports Injuries Incidence over Time in World-class Road Cyclists. Published online: November 6, 2014 Int J Sports Med 2015; 36: 241–248